Mathieu est un célibataire en processus de recherche d’emploi. Puisqu’il vient d’obtenir un poste à Montréal, il souhaite s’y trouver un logement. Il rencontre en juin 2015 Marcel, propriétaire d’un immeuble situé dans la métropole. Les deux parties en viennent à une entente et signent un bail résidentiel liant les parties du 1er juillet 2015 au 1er juillet 2018 au loyer mensuel de 900$. Mathieu décida de signer le bail puisqu’il a été convenu que le logement comprendrait un système d’air climatisé fonctionnel et serait meublé. Or, à son arrivée le 1er juillet 2015, Mathieu constate que le logement n’est pas meublé et que l’air climatisé ne fonctionne pas. Mécontent de cette situation, Mathieu refuse d’habiter dans ce logement et souhaite annuler le bail, d’autant plus qu’il ne l’aurait pas signé s’il avait su cela et qu’il a déjà payer le loyer pour le mois de juillet 2015. Qui plus est, Mathieu a entendu Marcel dire à l’un de ses amis au téléphone qu’il n’entend pas meubler l’immeuble ou réparer le système d’air climatisé et que, de toute manière, Mathieu n’osera jamais demander l’annulation du bail.
FAQ
Mathieu peut-il obtenir l’annulation du bail ?
Pour qu’un contrat puisse être annulé, il faut d’abord un motif valide au sens de la loi. Dans le présent cas, Mathieu a été induit en erreur par Marcel afin de l’amener à signer un bail qu’il n’aurait pas signé autrement. Il s’agit là d’un dol, soit un vice de consentement qui consiste à induire en erreur l’une des parties à un contrat de manière délibérée, qui peut résulter d’un mensonge délibéré, d’un silence ou d’une réticence. Pour être en présence d’un dol en bonne et due forme, il faut que certaines conditions soient rencontrées. Tout d’abord, le dol doit être déterminant, c’est-à-dire que la partie qui s’estime trompée n’aurait autrement pas conclu le contrat. En l’espèce, Mathieu fut motivé à signer le bail par le fait qu’il croyait qu’il aurait accès à l’air climatisé et à un logement meublé. Or, l’absence de meubles et d’air climatisé est précisément la source du vice de consentement. De plus,le dol doit avoir été provoqué par le cocontractant ou être connu de lui. Dans le présent cas, le dol émana de Marcel, l’un des cocontractants, et était bel et bien connu de lui puisqu’il a cherché à tromper Mathieu en toute connaissance de cause comme le démontrent les faits. Enfin, Mathieu devra faire la preuve du dol, soit de l’acte dolosif lui-même, mais aussi de l’intention de Marcel de le tromper.
Puisque nous sommes en présence d’un dol dans le présent cas, Mathieu est en droit de demander la nullité du bail, son consentement au bail ayant été vicié. En effet, tout vice de consentement peut être sanctionné par la nullité relative. Or, puisqu’il s’agit de nullité relative, seule la victime du vice de consentement, donc Mathieu, peut invoquer la nullité du contrat. Pour ce faire, il devra intenter une action en nullité devant un tribunal, deux parties ne pouvant annuler un contrat à l’amiable, sans intervention d’un tribunal. Une fois devant un tribunal, tel que susmentionné, c’est à Mathieu qu’il incombera de faire la preuve du dol qui a vicié son consentement et qui justifierait l’obtention de la nullité du bail.
Qu’est-ce que la nullité du bail implique?
La nullité d’un contrat implique d’abord sa disparition rétroactive. En effet, il est réputé n’avoir jamais existé. Or, à cette fin, si jamais les prestations auxquelles sont tenues chacune des parties ont déjà été exécutées en tout ou en partie, la restitution de ces prestations est de mise. Dans le présent cas, Mathieu a payé un mois de loyer le 1er juillet 2015 et Marcel, si la nullité du contrat est prononcée par un juge, serait donc tenu de lui remettre la somme payée. Cependant, dans le cas d’un contrat à exécution successive comme un bail résidentiel, donc d’un contrat dont l’exécution des prestations s’échelonne sur une certaine période de temps, la restitution est souvent mise de côté puisque la restitution de la jouissance d’un bien comme un logement est, en pratique, impossible. En effet, comment restituer le fait d’avoir profiter d’un logement pendant une certaine période de temps? Conséquemment, dans un tel cas, le contrat cesse d’exister pour l’avenir seulement. Dans le présent cas, Mathieu n’a pas jouit du logement, ayant souhaité annuler le bail dès le premier jour bien qu’il avait payé le loyer du mois de juillet 2015, et cela n’a donc pas à être pris en considération.
Mathieu peut-il obtenir des dommages-intérêts?
Pour obtenir des dommages-intérêts en sus de l’annulation du contrat, Mathieu devra démontrer qu’il a bel et bien subi un préjudice qui résulte de la raison pour laquelle le bail fut annulé. Dans le présent cas, cette raison s’avère être une faute intentionnelle de la part de Marcel, laquelle consistait à induire Mathieu en erreur pour l’amener à signer un bail qu’il n’aurait pas signé s’il n’avait pas été trompé. Par exemple, si Mathieu parvient à démontrer que, par la faute de Marcel, il doit dormir dans un hôtel en attendant de se trouver un autre logement et qu’il n’aurait pas eu à payer les frais qu’implique la location d’une chambre d’hôtel si ce n’avait pas été de la fraude de Marcel, un tribunal pourrait condamner Marcel à payer ces frais, de manière à compenser Mathieu pour le préjudice subi.